Je viens de passer deux jours à nettoyer et à ranger la totalité de mes livres et ceux qui connaissent mes 63m2 savent qu’il y en a dans toutes les pièces. Garance, mon amie du 4ème, nettement plus costaude que moi mais toute aussi fana de lecture, a assuré l’intendance. Elle a débarrassé, nettoyé et retourné chaque étagère. J’ai nettoyé chaque livre, regardé à quelle époque je l’avais lu, cherché quelques phrases soulignées et je crois bien avoir revécu quelques moments merveilleux de ma jeunesse, de ma vie d’étudiante, de ma vie professionnelle et même de ma vie depuis que je suis à la retraite.
Combien de fois ai-je lu « Corydon » de Gide ou « la difficulté d’être » de Cocteau ou « Portrait d’une amitié » de Vercors ? Combien de fois ces petits ouvrages m’ont-ils accompagnée à l’autre bout du monde ? Aujourd’hui je voudrais que tous mes proches les lisent, mais je ne peux pas me séparer des miens.
Pourtant depuis des années je me suis séparée de plusieurs centaines de livres. J’en ai vendu quelques-uns, j’en ai donné, j’en ai installé chez des amis proches, j’en ai offert à mes amis SDF, j’en ai déposé sur le banc de mon boulevard Berthier et surtout j’ai installé tous les livres d’histoire dans la « bibliothèque Henri Amouroux » du Mesmil-Manger, en pays d’Auge.
Pourquoi n’ai-je pas eu le courage d’Alberto Manguel qui a acheté une maison uniquement pour pouvoir y faire vivre tous ses livres ? J’ai eu cette maison mais je n’ai pas su la garder.
A mes côtés, aujourd’hui, dans mon petit appartement, vivent Stendhal, Primo Levi, Zweig et Joseph Roth, Pessoa et Anatole France…et tant d’autres dont je ne me suis jamais lassée.
Les livres de poésie recouvrent plusieurs étagères et je reste fidèle à Ritsos, Darwich, Nazim Hikmet autant qu’à Aragon, Eluard ou garcia-Lorca.
Je pense souvent à mon départ et à ce que tous mes livres deviendront. Je sais que mis dans ma tablette, ils ne pèseraient plus rien …Mais qui caressera mes reliures Bonnet, qui aura assez de temps pour feuilleter les albums Pléiade ? qui regardera les Voutch et les Tintin ?
Certes je lis moins mais mes amies libraires – Nathalie et Maïté – savent me tenir informée de la littérature d’aujourd’hui et vous comprenez pourquoi j’ai pu vous conseiller « Libertango ».
Je pensais avoir le temps de relire quelques ouvrages d’Anatole France, de Victor Hugo, de Romain Gary et même de Kessel…mais comme je continue à fréquenter toutes les librairies que je trouve sur mon chemin, la pile des « à lire » s’allonge. Et il faut savoir que je continue à tout aimer : les romans, les biographies, les polars et même les mangas… La lecture est un bonheur, une source d’énergie qui semble gèrer chaque instant de ma vie d’aujourd’hui.
Merci Garance de m’avoir permis cette promenade au milieu de tous ces livres, dont la plupart sont à mes côtés depuis plus de 50 ans. Certains m’ont accompagnée à l’autre bout du monde, d’autres ont effacé des peines et des larmes, d’autres ont su, simplement, améliorer le quotidien.
Quelques-uns vont trouver leur place près de toi, dans une bibliothèque toute neuve et je sais qu’ils seront heureux.
3 commentaires
Amie
Tu me donnes envie de faire pareil : nettoyer/ranger les livres
Mais la peur d’y rester sur chacun pendant des heures m ‘arrête. Et je me dis que non, c’est la peur que se declenchent des émotions inattendues, tu sais ces petits papiers qu’on trouve dans les livres, un billet de cinéma, un mot…qui font ressurgir les choses et les gens qui ne sont plus la. Bonheur et cruauté des petits papiers! La grande Régine les chantait…
Alors j’attendrai… Plus tard le nettoyage
Des baisers
Maya
Chère Jacqueline,
Je retrouve sur votre blog Simone la bouquiniste des marchés. Elle s’installait devant mon atelier à Pénestin d’où je l’ai croquée avec plaisir. Son grand chapeau lui sert d’abri quelque soit le temps. J’ai eu beaucoup d’échanges avec elle et j’espère la revoir au détour d’une allée. Je vous souhaite à vous et à Milord une bonne journée.
Bertie
Chère Jacqueline,
J’ai passé deux jours merveilleux en ta compagnie. J’ai découvert des auteurs que je ne connaissais pas, je t’ai un peu plus découverte à travers tes livres et des moments de vie que tu m’a fait partager. Quel plaisir.
Tu devrais écrire le roman de ta vie, ce serait passionnant.
Mille bises